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Philippe Orville
Portrait : Philippe Orville, l’énergie est son moteur

Il est un peu la mémoire « Ressources Humaines » de l’hôtellerie parisienne. Le retrouver 20 ans après c’est constater l’évidence : cette énergie vitale qui l’anime est toujours présente, l’œil pétille et seuls ses cheveux blancs trahissent le passage du temps.

Loué par beaucoup pour son professionnalisme, sa rigueur, apprécié de ses patrons, par ses prises de position tranchées et franches il a su imposer un style direct aux partenaires sociaux lors des nombreuses réunions et négociations qu’il a menées tout au long de sa carrière. Ainsi, cet ancien délégué d’un grand hôtel parisien le confesse : « Monsieur Orville était ferme, certes, mais juste. On savait, avec lui où on allait et surtout, il connaissait le terrain ! »

Les collaborateurs qui ont eu la chance de travailler à ses côtés évoquent toujours leurs années « Orville » avec nostalgie et admiration, se rappelant son extrême exigence, sa sincérité, sa grande franchise, sa capacité à créer du lien social et surtout son énergie hors norme lui ayant permis d’effectuer une remarquable carrière. Et pourtant, l’extraversion du personnage masque une pudeur extrême quant à sa vie.

Un Destin brisé

Fils de restaurateur (ses parents tenaient le « Corossol doudou » bien connu de la communauté antillaise parisienne des années 80), le futur de Philippe devait s’écrire dans la Restauration.  Par passion, il travailla deux années dans l’entreprise familiale avant de rejoindre en 1981, le Groupe Hilton. Chef de rang au Hilton Orly, alors navire amiral F&B du Groupe (le Food Research Center du Groupe Hilton était installé alors au Hilton Orly, il devint rapidement Maître d’hôtel.

Sa carrière était lancée ; croisant une génération dorée d’hiltoniens devenus des personnalités incontournables de l’hôtellerie internationale (Vincent Bergman, Jacques Brune, Dominique Dmytryszyn, Thierry Levasseur, Thierry Lefebvre…)  tous lui promettaient une carrière internationale de F&B et à terme de GM.

En 1986, Val Thorens, Savoie. Lors de ses vacances d’hiver, Philippe est victime d’un accident. Lui qui n’était qu’une boule d’énergie, sportif et « la tête pleine de projets » se retrouve paraplégique.

Mais, pour ceux qui le connaissent, s’il y a des qualités qu’on peut reconnaître chez Philippe, que l’on fasse partie de ses amis ou non, ce sont bien le courage, l’opiniâtreté, la force de caractère et l’envie.

Philippe loin de s’apitoyer sur son sort va retrouver son énergie, multiplier les rencontres professionnelles, reprendre le sport et se re-construire un destin.

Claude Reithler, l’humain au cœur !

Une rencontre va changer le cours de sa vie : la DRH d’alors du Groupe Hilton pour la France, Claude Reithler (IEP Paris) qui avait repéré Philippe et avait parié sur son formidable potentiel pour en faire un futur F&B, (« femme au charisme incroyable et à la remarquable intelligence » comme le rappelle Philippe) va alors lui proposer un « deal » inédit pour l’époque

 

« Les Ressources humaines, terra incognita pour l’homme de restauration que j’étais » Philippe Orville

Elle lui propose d’intégrer le département Ressources Humaines du Hilton Orly mais ce, après avoir suivi un parcours formation intense. Pendant deux ans, Philippe va suivre les cours de l’Ifocop Rungis, soutenu par son épouse et répondre aux espoirs placés en lui par Claude Reithler. D’abord nommé « Training  Manager » en 1988, il deviendra DRH en 1992 dans un contexte social bien singulier.

 

Un peu d’histoire

La fin des années 80, début des années 90 c’est une époque de transition dans la gestion des ressources humaines en hôtellerie. Le système de rémunération au pourcentage est dénoncé dans la plupart des hôtels, des licenciements collectifs ont lieu (Guerre du Golf…), en un mot, les premières grandes batailles sociales du secteur commencent.

Ces batailles vont le conforter dans une pensée qu’il fera sienne : le Métier doit être basé sur des compétences juridiques solides. Passant des heures à éplucher le Code du Travail annoté, participant à toutes les formations en droit social qui s’offraient à lui, il devient, à force de persévérance et de travail, la cheville ouvrière de ces batailles sociales pour Hilton France et ce, aux côtés de Claude Reithler.

 

Un parcours  international dans les Ressources Humaines

En 1999, après 18 années passées au sein de la famille Hilton, il tente l’aventure caribéenne : il sera pendant 3 ans le DRH de l’hôtel la Samanna à Saint-Martin marquant là encore, la fonction de son empreinte.

Puis, en 2002, un chasseur de tête le place à la tête des 4 hôtels Méridien d’Espagne et du Ritz Madrid.

Cet intermède hispanique va le conduire tout naturellement a être nommé en 2003 à la tête des hôtels Méridien (DRH France et Belgique)  sous enseigne Starwood puis Marriott. En 2016, Philippe est DRH Régional pour Marriott, poste qu’il occupera jusqu’à son départ du Méridien Paris en 2017.

En 2018, il effectuera une dernière mission en qualité de DRH régional pour les hôtels Constance aux Seychelles (Lemuria resort sur Praslin et Ephelia resort à Mahé).

Après 30 ans dans les Ressources Humaines, Philippe est désormais aux manettes d’AsCol Partners. L’aventure RH continue en somme.

 

Une modification de la  typologie des responsables ressources humaines 

Témoins privilégiés de la révolution Ressources Humaines, les gestionnaires R.H. ont vu leur typologie profondément bouleversée.

Là où les titulaires de DEA et DESS (Master 2) Ressources Humaines occupaient la plupart des postes  dans les années 90 aux côtés d’anciens issus du Métier et souvent formés à l’IFOCOP (qui était l’IGS de l’époque) se sont substitués des profils « écoles hôtelières » avec une spécialisation – ou non- RH et souvent complétés par une formation diplômante de l’Institut de Gestion Sociale (IGS). De facto, les compétences « droit social » et « paie » ont été supplantées par les compétences animation, recrutement et formation, les avocats et sociétés de sous-traitance de paie étant devenues pour la plupart des établissements et groupes des partenaires du quotidien.

Dernier changement et non des moindres : les années 2000  étaient celles de la mixité dans la profession. On citera les grands noms du Métier de l’époque comme Eric Girard (Concorde La Fayette) , Jacques Soquet (Groupe Concorde) , Pierre-Eric Fleury (Concorde la Fayette), Nicole Lyautey (Martinez), Claude Reithler (Hilton France), Marie-Françoise Marron (Groupe Abela puis Radisson Nice), Corinne Fifi (Hôtel Le Bristol), Philippe Gracieux (Grand Hotel Intercontinental) Catherine Durand, ( Concorde Hotels, Meridien France), Vincent Mackie (Hilton Paris, Concorde Hotels) , Bruno Demarest (Groupe Barrière Sud de la France, Ritz Paris et Palais des Festivals de Cannes), Eric Bellavigna (Carlton Intercontinental), Gilles Goïc (Servair, Intercontinental France, Hyatt France) , Jean-Gabriel Arnould (Prince de Galles, Concorde La Fayette, Plaza Athénée) , Amar Rami (George V), Agnès Prout Savin- Bonnel (Holiday Inn République), Sylvie Quintin (Sofitel Forum Rive Gauche, Peninsula Paris), Didier Chevalier (Intercontinental Paris, Westin Paris) ou bien encore Jean-Luc Defline au Méridien Montparnasse (désormais Pullman). Autant de femmes que d’hommes. Désormais, les D.R.H. hommes semblent avoir déserté la fonction ou plutôt, les femmes ont eu la reconnaissance professionnelle légitime puisqu’elles occupaient déjà 90% des postes dans les services.

Quant au contenu de la fonction, les enjeux formation et recrutement sont devenus centraux dans la politique Ressources Humaines. La pandémie a hissé le recrutement comme axe central de la politique Ressources Humaines. Toujours dans une logique d’amélioration de l’attractivité des métiers HCR, les conditions de travail, la rémunération sont l’objet de négociations au niveau de la branche mais également au sein des entreprises. À ce titre, les avantages sociaux que peuvent représenter les complémentaires santé ou les systèmes de prévoyance deviennent des éléments incontournables.

S’il est un professionnel des ressources humaines qui a pu observer cette mutation profonde du Métier, de ses enjeux, c’est bien Philippe Orville l’ancien D.R.H régional Marriott Paris.

Retraité des opérations depuis 2018, Philippe est désormais un observateur aiguisé de la chose sociale. Nous l’avons retrouvé lors d’une rencontre organisée à l’hôtel Raphaël Paris afin d’évoquer l’évolution du secteur mais également la non-prise en compte des enjeux stratégiques liés à la prévoyance et à la santé.

L’ancien DRH des Hôtels Méridien, passé également par Hilton, estime que cette mutation du Métier était inévitable

À la question de la profonde transformation du Métier de Directeur Ressources Humanes, l’ancien DRH des Hôtels Méridien, passé également par Hilton, estime que cette mutation du Métier était inévitable.

Pour lui « la complexité grandissante de la fonction  « Ressources Humaines » nécessite encore plus un accompagnement par des experts. Cette sophistication des Ressources Humaines est une évidence : le Dalloz Code du travail a doublé de volume en 20 ans, et de nombreuses procédures contraignantes (NAO, entretiens professionnels, RGPD, …) ou changements institutionnels sont intervenus (CSE…). »

Fidèle à sa vision des Ressources Humaines complexes, devenir un Expert en prévoyance et complémentaire Santé était, selon lui, une évidence.

La Tribune de l’hôtellerie : Pourquoi avoir choisi, en devenant expert en assurance collective,  cette « niche » des complémentaires santé, de la Prévoyance ?

Philippe Orville : Avec AsCol Partners (l’entreprise qu’il a co-fondé avec Hervé Déan un expert de l’assurance), je  propose aux hôteliers et restaurateurs une expertise dans plusieurs domaines relatifs à l’assurance collective et plus précisément dans la protection sociale, la prévoyance et la retraite.

La paie, qui est un enjeu important en termes de flux économiques, fait souvent l’objet d’une sous-traitance/délégation dont le seul objectif est de produire le bulletin de paie, les écritures comptables, les déclarations URSSAF et DUE. Ainsi, les tâches relevant des ressources humaines sont si chronophages et procédurières que, bien souvent, même dans les gros départements RH, le temps nous manque pour renégocier les contrats ou même les lire dans leur intégralité. N’oublions pas que nous sommes dans le domaine de l’assurance : qui a déjà lu l’intégralité de son assurance habitation ou de son contrat auto ? Mon rôle est donc d’être un facilitateur : en une rencontre, je donne les clés de compréhension du contrat traitant de la complémentaire santé, de la prévoyance.

 

La Tribune de l’hôtellerie : Pourtant, la prévoyance, la santé ne semblent toujours pas représenter des enjeux majeurs pour la plupart des décideurs hôteliers alors même leur poids économique est important. Pourquoi ?

Philippe Orville : Selon moi, pour quatre raisons majeures : la première est que longtemps les employeurs se sont vus opposés la même réponse quand ils demandaient des comptes à leur Mutuelle : « c’est obligatoire car négocié au niveau de la branche et les taux ou couvertures ne sont pas négociables », la seconde raison est que les économies potentielles relevant des assurances sociales collectives ne semblaient pas être un enjeu important. La troisième raison est l’apparente complexité du système : on le sait, le secteur de l’Assurance rivalise d’ingéniosité pour rendre compliquées les choses les plus simples ! Et enfin, la dernière raison est que ces assurances sont au carrefour des départements Ressources Humaines et Finances diluant de facto l’intérêt de ce sujet et les responsabilités. C’est en partie pour régler ce problème que le poste de Compensation & Benefits Manager est apparu en force ces dix dernière années dans la plupart des groupes internationaux.

 

La Tribune de l’hôtellerie : Quel est votre mode d’intervention ?

Philippe Orville : J’interviens avant tout comme un auditeur. Je dresse dans un premier temps un constat concernant la pertinence des prestations sociales en vigueur dans l’entreprise. Ainsi, tout est passé au crible : conformité légale et conventionnelle, identification des risques URSSAF, fiscaux et prud’homaux découlant directement des législations applicables aux dispositifs de protection sociale complémentaire, balance sinistres/primes, c’est à dire l’équilibre général du régime, les garanties couvertes. Une fois ce premier bilan établi, nous nous asseyons avec le ou la DRH, le ou la DAF et le ou la DG et évaluons les pistes d’amélioration en matière de garantie et de correction des risques identifiés. Un nouveau tableau est donc dressé. Une fois ce tableau synthétique réalisé, nous proposons un contrat à l’hôtelier, contrat proposant souvent une renégociation contractuelle impactant les garanties, les prestations et bien évidemment le montant des primes, mais aussi l’environnement RH dans lequel sont gérés les dispositifs de protection sociale complémentaire, pour éviter à l’entreprise de se mettre sous risque URSSAF, fiscal ou prud’homal. Nous engageons ainsi notre responsabilité professionnelle dans cet accompagnement au quotidien.

La Tribune de l’hôtellerie : Mais combien coûte votre intervention  ?

Philippe Orville : Rien ! Je m’explique. Comme un « cost killer » le fait au niveau des achats de matières premières, nos prestations se basent sur les économies réalisées, en cas de mission ponctuelle, ou à travers les commissions versées par l’assureur. Cette logique Gagnant/Gagnant n’engageant pas des dépenses supplémentaires pour nos clients, cela explique, pour partie, le succès de notre formule.

Vous évoquez « de substantielles économies » réalisées par vos clients. Pouvez-vous citer un exemple ?

Philippe Orville : Nous sortons actuellement d’une mission auprès d’un Palace parisien. Pour des raisons évidentes je ne peux évoquer le nom de cet établissement. Nous avons réalisé en travaillant conjointement avec sa Direction Ressources Humaines près de 100 000 euros d’économie sur l’année et ce, sur une simple renégociation tout en réorientant les garanties.

L’entretien s’achève sur un constat évident : à la lumière des éléments délivrés par Philippe Orville, nul doute que son intervention risque bien de devenir un incontournable des établissements hôteliers de pointe. Éternel Ressources Humaines. Beaucoup de travail en perspective.

(Un article d’Oscar F.)

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