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Le 1er décembre, Budapest va tourner une page emblématique de son histoire. Ce jour-là, l’hôtel Gellért situé au pied de la colline du même nom (Gellért-hegy) à proximité du pont de la Liberté, va fermer ses portes pendant au moins deux ans pour une rénovation totale.

Le lieu va être transformé en un palace cinq étoiles. Il en sera donc fini de ce mythique hôtel de quatre étages, connu dans le monde entier et qui venait de fêter, il y a peu, son centenaire. Initialement appelé le Saint Gellért, en honneur du premier évêque de Hongrie du onzième siècle, l’hôtel avait été gravement endommagé pendant la Seconde guerre mondiale. En 1946, les nouvelles autorités communistes qui voulaient supprimer toutes références chrétiennes dans la nouvelle Hongrie, l’avaient rebaptisé tout simplement « Hôtel Gellért ».

Rénové à maintes reprises, l’hôtel Gellért a toujours conservé son style Art Nouveau qui faisait l’admiration des amoureux de cette époque et la joie des touristes. La station thermale qui jouxte le bâtiment devrait aussi être rénovée, mais elle reste la propriété de la municipalité de Budapest. Sa fermeture pour travaux est prévue le 1er mai 2022 afin de les coordonner avec ceux de l’hôtel. « Le bâtiment et les bains sont liés et les travaux doivent se faire dans le même temps », explique notre guide Balázs Bánhegyi, qui n’est autre que le directeur général de Gellért. Il se dit « un peu triste », de devoir quitter ses fonctions au mois de décembre.

« Certains redoutent déjà qu’il cède aux standards des palaces mondiaux et ne sacrifie les trésors architecturaux qui structurent l’hôtel depuis plus d’un siècle. »

L’hôtel a été vendu en 2019 par la chaîne Danubius au groupe Indotek qui a décidé d’entreprendre cette immense rénovation. Son propriétaire majoritaire, Dániel Jellinek, est l’une des cinquante personnes les plus riches de Hongrie, selon l’édition hongroise du magazine Forbes. Sa fortune est estimée à 300 millions d’euros. Bien qu’il se déclare « apolitique » et principalement homme d’affaires, il est considéré par le site d’investigation hongrois Direkt36, comme « un proche » de Viktor Orbán à travers les liens commerciaux qu’il entretient avec István Tiborcz, le gendre de l’actuel premier ministre, et les cercles d’affaires proches du gouvernement.

Dániel Jellinek n’a pas encore dévoilé ses projets de transformation pour l’hôtel Gellért, mais certains redoutent déjà qu’il cède aux standards des palaces mondiaux et ne sacrifie les trésors architecturaux qui structurent l’hôtel depuis plus d’un siècle. En effet, seule la façade est classée, mais pas l’intérieur de l’établissement.

Pourtant, en passant pour une dernière fois la porte à tambour de l’hôtel construit par les architectes hongrois Ármin Hegedűs, Artúr Sebestyén et Izidor Sterk dans le style Sécession des palaces-hôtels du début du XXème siècle, c’est un saut dans le passé que l’on s’offre, couplé à une grande émotion.

On y arrivait en hydravion

L’entrée avec sa haute coupole en verre est décorée de reliefs d’Aladár Gárdos. Banquettes et fauteuils en cuir rouge vous accueillent dans le hall ovale soutenu par des hautes colonnes en marbre qui, au fil des époques, a vu défiler écrivains hongrois, rois, reines, ducs, archiduchesses, chefs d’État, acteurs et actrices venus directement d’Hollywood ainsi que les plus grands chefs d’orchestre et musiciens comme Yehudi Menuhin, Arthur Rubinstein, Pablo Casals, Isaac Stern, Carlo Zecchi ou le compositeur Dimitrij Shostakovich.

Tous ont pris leurs quartiers dans les suites dominant le Danube. L’hôtel reconnaissant a d’ailleurs donné le nom de « Yehudi Menuhin » à la suite 422, la plus prestigieuse de l’hôtel, située à la hauteur de la statue de la Liberté du sculpteur Zsigmond Kisfaludy Stróbl, commémorant la fin du régime nazi et la « libération » de la Hongrie par l’Armée rouge. La 315, un étage en dessous, porte le nom de Richard Nixon (1913-1994), l’ancien président des États-Unis. Jusqu’en 1926, les grandes fortunes pouvaient arriver au Gellért en avion jusqu’au pied de l’hôtel grâce à une station d’hydravions construite spécialement sur le Danube, mais rapidement abandonnée.

« Le Gellért est rapidement devenu une plaque tournante de la vie sociale et mondaine budapestoise, grâce à ses grands intérieurs, ses terrasses et ses piscines. »

« C’était le premier hôtel en Hongrie où les clients pouvaient payer dans la devise de leur propre pays », rappelle M. Bánhegyi en poursuivant la visite. Chaque client pouvait également trouver un mini-bar dans sa chambre. Dès sa construction, l’hôtel offrait des suites avec des salles de bains où l’eau thermale coulait des robinets, excellente pour la santé des clients mais moins pour celle des tuyauteries. (…) Lire la suite sur Courrier d’Europe Centrale

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