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Pourquoi vous être positionné sur le dossier Courtepaille ?

Nous sommes entrés dans ce projet de cession de Courtepaille avec une vision de long-terme, impulsée par notre actionnaire TDR Capital, qui est de construire en France un groupe de restauration multi-marques et multi-cuisines. Pour y arriver, il faut être capable d’exploiter tout le potentiel d’une enseigne et de ses restaurants. Et c’est ce que nous sommes en train de réaliser sur Buffalo Grill. Lorsque je suis arrivé il y a deux ans, la feuille de route était claire. Il s’agissait de moderniser une marque iconique, identifiée par tous les consommateurs, mais en perte de vitesse. Nous avons opéré un vrai retournement, dans l’assiette, le service, dans la formation des équipes, la modernisation de notre patrimoine, ou le digital, et renoué avec la croissance des ventes moins d’un an plus tard. Nous avons ranimé cette dynamique commerciale auprès de nos 32 millions de consommateurs, et la crise sanitaire ne l’a pas éteinte. Un exemple: nous faisons mieux que le marché depuis juin dernier, en recul de seulement 5% par rapport à 2019. Le fait que le Tribunal de commerce d’Evry nous ait choisis pour reprendre Courtepaille valide la crédibilité et le savoir-faire acquis sur Buffalo Grill. Nous sommes ravis d’accueillir dans le groupe une marque aussi forte que peut l’être Courtepaille, et d’opérer les deux réseaux les plus importants de la restauration en service à table, avec 600 restaurants.

Que prévoit le projet de reprise ?

Le plan de cession prévoit la reprise de 145 restaurants succursales sur 187, garantissant l’emploi de 2100 salariés sur 2485, et des 92 établissements franchisés, qui emploient 1000 collaborateurs. Au total ce sont près de 240 Courtepaille, et 85% des effectifs que nous allons maintenir. Et cela correspond complètement à nos intentions pour réussir à relancer l’enseigne. Je veux que désormais nous portions les efforts sur les ventes plutôt que sur le compte d’exploitation. Pour retrouver une dynamique commerciale en restauration, il n’y a pas de secret, il faut miser sur l’humain. Nous faisons avec Courtepaille le choix d’une intensité de service, afin de garantir la meilleure prestation et expérience possibles en restaurant. C’est le pari que nous avons fait sur Buffalo Grill il y a deux ans, et nous ne l’avons pas regretté.

Buffalo Grill opère comme Courtepaille sur le marché du grill, comment s’assurer que ces deux réseaux n’entrent pas en concurrence directe ?

Afin de définir le périmètre de reprise, nous avons visité 260 emplacements. J’en ai personnellement visité 70 cet été. Il était important d’avoir un périmètre éclairé le plus finement possible. Au final, pas plus de 25% des restaurants intégrés au plan de cession partagent les mêmes bassins de population et zones de chalandise que Buffalo Grill. Et si nos deux marques évoluent toutes deux en périphérie urbaine, elles ont des identités tout à fait différentes : Buffalo Grill a déployé son univers US d’abord en zones commerciales, quand historiquement, Courtepaille est une enseigne qui s’est développée autour des flux, principalement routiers. Et même si elles opèrent toutes deux sur le marché du grill, il y a en France la place pour ces deux marques iconiques : un Français va en moyenne 38 fois au restaurant dans l’année, et dans 18 enseignes différentes. Le projet est d’ailleurs très clair sur ce point : nous n’avons pas acheté d’emplacements pour y mettre des enseignes de fast-food, ou des Buffalo Grill, mais bien une  marque et sa puissance, son histoire, ses codes, ce qui la lie aux consommateurs en France, et que nous allons réactiver auprès d’eux.

Quels leviers pour transformer Courtepaille ?

Nous allons appliquer une méthode de restaurateur, comme nous l’avons fait avec Buffalo Grill. Le résultat sera, comme l’ADN des deux marques, forcément différent, mais la méthode, elle, restera. Sur Buffalo Grill nous sommes partis d’un univers daté, les cow-boys et les indiens, pour aller sur les codes du BBQ américain. Tout est parti de l’assiette. 80% de notre proposition a été retravaillée, en y mettant de la qualité, des grammages, du goût, et plus de spécificité dans nos recettes-phares. Ces piliers confortés, nous nous sommes ensuite attachés à moderniser les outils. Cela passe par des intérieurs revus, avec la dernière version du concept déployée dans 45 restaurants d’ici la fin d’année, mais aussi par les services, notamment digitaux. Pas moins de 35 restaurants à ce jour, et l’intégralité des 360 Buffalo Grill, intègreront la commande géolocalisée en salle via smartphone. Nous sommes les seuls en Europe à déployer ces outils sur cette échelle. Toutes ces transformations ont un objectif : apporter du service et moderniser l’expérience. C’est ce que nous allons faire sur Courtepaille. Aujourd’hui, la priorité est de rouvrir l’ensemble des restaurants, c’est chose faite dès aujourd’hui, avec un staff en place. Vont venir très rapidement la transformation en profondeur de l’assiette, et avec Courtepaille, nous avons un territoire de marque très puissant. Puis ces prochaines semaines nous ferons des premiers tests sur de nouveaux codes et éléments de décor. Il est important que nous montrions rapidement, à nos clients comme à nos équipes, où l’on veut emmener Courtepaille. Pour les cinq prochaines années, nous avons prévu 100 millions d’euros d’investissement, dont 80% dédiée à la modernisation du parc et au déploiement des services digitaux, et 20 millions de dépenses marketing afin d’animer ce repositionnement auprès des consommateurs.

La reprise de Courtepaille s’inscrit-elle dans une stratégie plus large de croissance externe ?

Notre ambition, je le redis, est de construire un groupe multi-marques en restauration. Nous avons les ressources et les savoir-faire pour accueillir ces prochains mois d’autres enseignes.

Il y a actuellement des signaux sur un durcissement à venir des conditions d’ouverture des établissements, notamment en zone d’alerte maximale (NDLR : interview réalisée le 14 octobre, avant les annonces d’Emmanuel Macron). Votre retour sur l’impact de telles décisions, si elles étaient confirmées, sur des opérateurs déjà fragilisés ?

Je suis très inquiet pour notre profession. Ceux qui sont, comme nous, structurés en groupe ont les moyens de tenir, mais ce n’est pas le cas des restaurateurs indépendants. Ce qui est terrible depuis le début de la crise sanitaire, c’est qu’à force d’entendre, y compris de la part des pouvoirs publics, que les restaurants sont des clusters en puissance, on a fini par les stigmatiser. Ce qui est profondément injuste. Quelle profession s’est-elle mieux organisée que la restauration face au risque épidémique ? Sur quels autres métiers a-t-on à ce point formalisé et assuré le plus grand respect des normes ? On est en train de tuer une industrie… Il y a urgence à trouver des solutions. Propos recueillis par Yannick Nodin

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